Grand Seiko pour les Nuls - Les mouvements
Dans ce numéro de “Grand Seiko pour les Nuls”, je vous guide au travers des différents mouvements qu’utilise la marque, autant d’un point de vue technique qu’historique. Avec cet article, les mouvements Grand Seiko n’auront plus de secret pour vous !
Après avoir évoqué les divers aspects du design de Grand Seiko, je vous propose donc aujourd’hui de passer au côté verso et de voir comment les valeurs de précision et de fiabilité se traduisent dans les mouvements de la marque.
L’offre de Grand Seiko s’articule autour de 3 technologies:
- les mouvements mécaniques 9S
- les mouvements quartz 9F
- les mouvements Spring Drive 9R
Les mouvements 9S sont fabriqués, assemblés et emboités par Seiko Instruments Inc à Shizukuishi, préfecture d'Iwate, dans le nord du Japon, alors que les 9R et 9F sont fabriqués, assemblés et emboités par Seiko Epson à Shiojiri, préfecture de Nagano, dans les Alpes Japonaises, au centre du Japon.
Dans sa période vintage (1960-1975), Grand Seiko représentait l’excellence Japonaise de l’horlogerie mécanique, avec des mouvements extrêmement qualitatifs et innovants, en particulier les mouvements dits Hi Beat battant à 36000 alternances par heure.
Avec la montée du quartz, Grand Seiko disparait en 1975 avant de renaître en 1988 avec des mouvements quartz.
Ce n’est qu’en 1998 que la marque renaîtra avec des mouvements mécanique.
Puis le début des années 2000 sera marqué par l’arrivée du Spring Drive, un mouvement haut de gamme unique à Seiko, un petit bijou technologique et une vraie révolution horlogère.
La connaissance de ces différents mouvements permet aussi de mieux comprendre le langage secret des références Grand Seiko.
J’ai essayé de faire quelque chose de pas trop technique, accessible à tous, mais à la fois assez complet. Si certains sujets techniques vous intéressent, la discussion est ouverte !
Les mouvements mécaniques 9S: le classique, héritage des années 60
Principe de fonctionnement
Rien de bien original ici, comme pour toutes les montres mécaniques, un ressort de barillet, une train de rouage, un échappement. Pas besoin d’aller plus loin il me semble.
Les spécificités
L’accent est mis sur deux aspects: la précision et la robustesse/fiabilité/durabilité.
Grand Seiko utilise des alliages propriétaires pour le ressort de barillet (amélioration de la réserve de marche) et pour le spiral (grande élasticité, reprend sa forme même après de grandes déformations).
L’ancre et la roue d’échappement sont fabriqués à l’aide de la technologie MEMS qui permet de faire des pièces plus précises, plus petites, plus légères. Les dents ont à leur extrémité des petits décrochements qui servent de réservoir à lubrifiant.
Toutes les roues (leurs dents pour être plus précis) du train de rouage sont polies une à une pour assurer une transmission de l’énergie optimale.
On retrouve deux mouvements principaux, 9S6x (plusieurs déclinaisons en fonction des complications) et 9S8x (idem).
Le 9S6x est un mouvement à 28,800 alternances avec plus de 72h/3 jours de réserve de marche, alors que le 9S8x est un mouvement dit Hi-Beat, à 36,000 alternances, avec 55 heures de réserve de marche.
Tous les mouvements mécaniques Grand Seiko suivent le «Standard Grand Seiko», avec 17 jours de tests dans 6 positions et à 3 températures différentes. Les tolérances de marche sont de -3/+5 secondes par jour (je ne rentre pas plus dans les détails de chaque mesures, mais c’est un standard très complet et stricte).
Historique et évolution
Le premier calibre 9S a été développé par Akira Ohira pour la renaissance des Grand Seiko mécaniques en 1998. Il s’est basé sur le calibre 52, un mouvement mécanique haut de gamme sorti en 1970, ayant été amélioré et relancé en 1992. Le 9S s’en inspire mais est une version nettement supérieure et entièrement repensée.
Ce premier calibre de 1998est le 9S5x, proposé en version 3 aiguilles sans date (9S51) et avec la date (9S55). Ce mouvement ne propose que 48h/2 jours de réserve de marche.
Après deux variantes (la 9S54 à remontage manuel en 2001 et le 9S56 GMT en 2002), Grand Seiko commence à remplacer en 2006 les 9S5x par les 9S6x toujours utilisés aujourd’hui, avec quelques évolutions techniques et surtout la réserve de marche qui passe de 2 jours à 3 jours.
Sa première version est le 9S67 avec l’indicateur de réserve de marche à 3h et qui ne sera pas produit très longtemps. En 2010, Grand Seiko propose les versions classiques 3 aiguilles no-date 9S61 et date 9S65. Au fur et à mesure, le 9S6x connaitra différentes version (listées dans le point suivant).
En 2009, Grand Seiko introduit en parallèle du mouvement 9S6x son nouveau mouvement Hi Beat, une des signatures de Grand Seiko depuis la fin des années 60. Il s’agit du 9S85, une des signatures de Grand Seiko. Sa seule évolution à ce jour est le 9S86 sorti en 2014, qui rajoute la fonction GMT.
En 2018, Grand Seiko introduit son premier mouvement mécanique moderne pour femme, avec les 9S25 et 9S27, respectivement date et no date.
Grand Seiko a également introduit quelques rares montres équipées de mouvements «Special» et «VFA» (pour Very Fine Adjusted), qui font référence à des tolérances chronométriques plus strictes utilisées par GS dans les années 60 et 70. Special correspond à +/- 3s/jour et VFA +/- 2s/jour (en fait 30 sec/mois). Les références des mouvements sont identiques mais les cadrans indiquent Special ou VFA et le rotor est décoré du médaillon du lion en or.
Nouveautés
Pour les 60 ans de Grand Seiko, la marque vient d’annoncer un nouveau calibre mécanique pour 2020.
Il s’agit du 9SA5, un mouvement intégralement repensé par rapport aux 9S classiques.
Il s’agit d’un mouvement Hi Beat avec 80 heures de réserve de marche, une nouvelle disposition du train de rouage qui permet de réduire l’épaisseur du mouvement et surtout un nouvel échappement.
Pour les amateurs de technique, il s’agit d’une amélioration de l’échappement Robin, déjà retravaillé au début des années 2000 par Audemars Piguet. Au premier coup d’oeil on pourrait penser au Co-Axial de Daniels/Omega, mais le nouvel échappement GS génère moins de frottements, avec moins de pièces, ce qui le rend techniquement supérieur.
Ce nouveau mouvement utilise également pour la première fois un spiral à courbe terminale. La forme est différente de celle de Bréguet mais le principe reste le même.
L’échappement profite d’un pont traversant, la découpe des ponts et les décorations sont très différents de ce que faisait GS par le passé, avec un look beaucoup plus Européen.
Liste des mouvements et références associées
9S51 No Date - SBGR
9S54 Manuel - SBGW
9S55 Date - SBGR
9S56 GMT - SBGM
9S61 No Date - SBGR ou STGR
9S63 Petite seconde à 9h + indicateur de réserve de marche à 3h - SBGK
9S64 Manuel - SBGW
9S65 Date - SBGR
9S66 GMT - SBGM
9S67 Indicateur de réserve de marche à 3 - SBGL
9S68 Date (diamètre supérieur) - SBGR
9S85 Date - SBGH
9S86 GMT - SBGJ
9SA5 Date - SLGH
9S25 Date (ladies) - STGK
9S27 No Date (ladies) - STGK
Les mouvements quartz 9F: le quartz qui surpasse le quartz, assemblé à la main
Principe de fonctionnement
C’est Pierre et Jacques Currie qui ont découvert en 1880 une propriété intéressante du quartz, appelée la piézoélectricité. Il s’avère que certains matériaux comme le quartz se mettent à osciller (ou vibrer si vous voulez) lorsqu’ils sont traversés par un courant électrique. Si ce courant est régulier et que la température ambiante est stable, le cristal de quartz oscillera à une fréquence très stable, ce qui donne donc l’intérêt au quartz.
Contrairement à un échappement mécanique classique qui va osciller à 4 ou 5Hz, dans une montre à quartz, le quartz vibre à 32,768Hz, et plus un oscillateur oscille vite, plus il sera stable, ce qui participe grandement à la précision des mouvements à quartz.
Ici, le ressort de barillet (source d’énergie dans un mouvement mécanique) est remplacé par une pile et l’échappement à ancre est remplacé par un cristal de quartz et un moteur pas à pas.
C’est Seiko qui a commercialisé la première montre-bracelet à quartz au monde le 25 Décembre 1969.
Les spécificités
On associe souvent le quartz à la précision, et c’est vrai que généralement un mouvement à quartz sera bien plus précis qu’un mouvement mécanique. Ayant ici à faire à un des tous meilleurs mouvements à quartz au monde, il va de soit que la précision est exemplaire, mais ce n’est pas l’argument principal du 9F.
Je m’explique. Seiko proposait des quartz avec une tolérance de +/- 5 secondes par ans dès 1978. Donc l’évolution du quartz pour produire le 9F ne s’est pas faite dans le sens de l’amélioration de la précision, mais dans l’amélioration de la fiabilité et de la durabilité. Le 9F est rempli d’innovations techniques qui ne vont pas améliorer la tolérance chronométrique, mais qui vont améliorer le mouvement dans son ensemble. Je vous rappelle d’ailleurs qu’il y a 31 536 000 secondes dans une année, donc une tolérance de 10 secondes (+ ou - 5) correspond à une précision de 99,999968%.
Bon, maintenant ça va devenir un peu technique, accrochez-vous ou passez directement au point suivant.
Allez, voyons les spécificités des mouvements 9F:
- Mouvement encapsulé
Afin d’éviter l’intrusion de poussières dans le mouvement (y compris lors du changement de pile), celui-ci est encapsulé, ce qui participe également à augmenter la durée de vie des huiles.
- Des cristaux de quartz fabriqués en interne, sélectionnés puis vieillis
Les caractéristiques d’un cristal de quartz évoluent un peu au cours de sa vie. Grand Seiko vieilli donc artificiellement ses cristaux pendant 3 mois avant qu’ils soient prêts à être intégrés à leurs mouvements. Après cette phase de vieillissement accélérée et de stabilisation, uniquement les cristaux de qualité supérieurs sont sélectionnés si leurs caractéristiques sont conformes au standard exigeant de GS. D’autre part, chaque cristal de quartz ayant des propriétés légèrement différentes, ces caractéristiques sont enregistrées préalablement dans le circuit imprimé et chaque cristal sera couplé avec son propre circuit imprimé.
- Mouvement thermocompensé
Selon la température ambiante, la fréquence du quartz peut varier et donc influer la précision du mouvement. Le 9F utilise donc un système complexe qui va mesurer la température à l’intérieur du mouvement 540 fois par jour et adapter le courant appliqué au cristal dans le but d’assurer une fréquence constante.
- Twin Pulse Motor
Un des soucis des mouvements à quartz, c’est qu’ils ont un couple nettement inférieur aux mouvements mécaniques, ce qui rend l’utilisation d’aiguilles massives impossible. GS a réussi à contourner ce problème en développant un moteur qui donne non pas une impulsion par seconde, mais deux consécutives. Le double saut est invisible à l’oeil nu, mais permet l’utilisation d’aiguilles plus massives, une des signatures esthétiques de GS (cf le chapitre 2 sur le design des cadrans et des aiguilles).
- Anti Backlash Auto-Adjust mechanism
Dans tout train de rouage, il faut qu’il y ait un peu de jeu entre les roues pour qu’elles s'engrènent parfaitement. C’est ce jeu qui explique que dans tout mouvement à quartz, la trotteuse ne s’arrête jamais nettement sur chaque graduation, mais oscille légèrement avant de s’arrêter. Dans un but de précision, Grand Seiko a développé un système ingénieux avec une dernière pièce sur le train de rouage, qui met en tension celui-ci et élimine le jeu, stabilisant donc le mouvement de la trotteuse.
- Axes indépendants
Lors de la mise à l’heure d’une montre, les différents jeux de frottements provoquent souvent des mouvements indésirés de la trotteuse. Toujours dans un soucis de précision et d’excellence, GS a estimé que ce genre de chose n’était pas acceptable et a donc modifié le système d’axes des aiguilles pour les rendre indépendantes et donc supprimer les mouvements parasites de la trotteuse lors de la mise à l’heure. Ils ne font d’ailleurs confiance qu’à l’expérience des artisans GS pour le montage des aiguilles, qui ne sont séparées que de 0,2mm. L’ajustement ne peut être automatisé et l’intervention humaine est indispensable.
- Date instantanée
La précision étant au coeur de Grand Seiko, les ingénieurs de GS on décidé de mettre au point un système de passage de la date en 1/2000ème de seconde, soit 200 fois plus vite qu’un clignement d’oeil, où comment passer du 1er Janvier au 19 Juillet en un clin d’oeil !
- Trimmer
Si malgré tout, le porteur de la montre se rend compte avec le temps que celle-ci a tendance à avancer ou retarder, le mouvement a une sorte de vis de réglage qui permet d’ajuster encore plus finement la marche de la montre.
Historique et évolution
Grand Seiko a utilisé plusieurs mouvements à quartz avant de passer au 9F en 1993.
La première version du 9F est le 9F83 avec le jour et la date dans une fenêtre unique à 3h, héritage de Taro Tanaka.
Le mouvement a été décliné ensuite en version avec uniquement la date, le 9F82. En 1997, GS a également proposé également le même mouvement mais d’un diamètre inférieur, le 9F61 et 9F62 (no date et date également).
Ces mouvements sont tous donnés avec une tolérance de +/- 10 secondes par an, mais on retrouve des versions spécialement ajustées, avec un contrôle particulier sur les quartz et données pour +/- 5 secondes par an, reconnaissables uniquement à l’étoile à 5 branches (une par seconde) sur le cadran à 6h. Ces mouvements portent exactement la même référence que les autres.
En 2018, Grand Seiko apporte une vraie évolution avec la fonction GMT dans le 9F86. Ce changement semble anodin mais il a demandé aux ingénieurs de GS un long travail de R&D. En effet, pour une vraie fonction GMT, il faut que l’aiguille des heures soit indépendante, ce qui n’était pas compatible avec la date instantanée sans la fabrication d’un sautoir spécifique qui n’était techniquement impossible de fabriquer dans les années 90. En repensant totalement ce système et cette pièce, clé de voute du système GMT, et en appliquant les dernières méthodes de fabrication développées par Seiko Epson, les ingénieurs furent en mesure de finalement proposer le 9F avec une fonction GMT avec aiguille des heures indépendantes.
Nouveauté
En 2020 et à l’occasion des 60 ans de Grand Seiko, la dernière version du 9F vient d’être commercialisée avec le 9F85, un mouvement 3 aiguilles + date avec réglage indépendant de l’aiguille des heures. Vous vous demanderez peut-être l’utilité d’une aiguille des heures indépendante sans GMT? Ca permet de faire le changement d’heure à l’automne et au printemps sans avoir à arrêter sa montre, afin de profiter pleinement de la précision superlative du 9F.
Liste des mouvements et références associées
9F61 No Date - SBGX
9F62 Date (petit diamètre) - SBGX
9F82 Date - SBGV
9F83 Day Date - SBGT
9F85 Date + aiguille des heures indépendante - SBGP
9F86 GMT - SBGN
Autres mouvements quartz utilisés par le passé
9581 No Date - SBGS
9587 Date - SBGS
8J55 No Date - SBGF
8J56 Date - SBGF
8N65 Date - SBGG
3F81 No Date (ladies) - STGS
4J51 No Date (ladies) - STGF
4J52 Date (ladies) - STGF
Les mouvement Spring Drive 9R: l’exclusivité Seiko
Principe de fonctionnement et spécificités
C’est pas pour rien que j’ai mis le Spring Drive en dernier. Pour simplifier à l’extrême, on pourrait dire que c’est un hybride entre le mécanique et le quartz (bien que Seiko n’aime pas qu’on dise ça).
L’idée d’origine était de combiner la précision du quartz avec l’énergie toujours disponible et écologique d’un mouvement mécanique.
Comme une montre mécanique, l’énergie est stockée dans un ressort de barillet que l’on tend en remontant la montre. L’énergie est transmise ensuite au train de rouage, tout comme sur une montre mécanique. Pour l’instant, tout est identique à un mouvement mécanique classique. Mais l’échappement est remplacé par ce que Seiko appelle le régulateur Tri-Synchro. Ce nom vient du fait que ce système gère trois types d’énergie, l’énergie mécanique, l’énergie électrique et l’énergie électro-magnétique.
Tout comme un mouvement mécanique fait tourner la roue d’échappement puis le balancier, dans le Spring Drive cet ensemble est remplacée par la Glide Wheel, une roue qui tourne toujours dans le même sens et qui est entrainée par l’énergie mécanique du ressort de barillet. Sur l’axe de cette roue se trouve un aimant et le tout est entouré de bobines. Alors que la Glide Wheel tourne, l’aimant tourne entre les bobines, ce qui génère un infime courant électrique suffisant à alimenter le reste du régulateur Tri-Synchro. Cet infime courant permet d’activer le «cerveau» de la montre, un circuit composé de deux parties: un cristal de quartz et une petite puce qui va à compter à quelle fréquence tourne la Glide Wheel. La puce va ensuite comparer la fréquence de rotation de la Glide Wheel avec celle d’oscillation du quartz et ajuster en temps réel un frein électromagnétique pour la stabiliser à 8 tours par seconde.
Contrairement à un échappement mécanique qui va bloquer puis relâcher la roue d’échappement, donnant le fameux «tic tac» à la montre, il n’y a ici aucun contact physique entre les pièces et le frein est uniquement électromagnétique, ce qui explique que la trotteuse glisse de manière parfaitement fluide, sans le moindre à-coup.
Pour paraphraser un copain horloger dans une grande marque Locloise, «c’est un peu comme enlever l’échappement de ta montre en avoir un Maître Jedi qui utilise la Force 24h/24 pour réguler ta montre».
J’ai parlé plusieurs fois d’un infime courant électrique. Celui-ci est d’exactement 25 nanoWatts, soit un 1 Watt divisé par 25 millions, ou autrement dit 1/300 000 000ème de l’électricité nécessaire à faire fonctionner une LED. Pour mettre ce chiffre en perspective, si chaque habitant de la terre portait un Spring Drive, la consommation totale d’électricité serait de 175 watts, soit une grosse ampoule.
Je ne rentrerai pas plus dans les détails techniques, mais si ça vous intéresse la revue de David Brenan sur A Blog to Watch est excellente pour ça: https://www.ablogtowatch.com/history-seiko-spring-drive-movement/2/
Le Spring Drive propose une précision de +/- 15 sec/mois, ce qui est très conservateur puisqu’on constate plutôt une dérive de l’ordre de quelques secondes par mois. La réserve de marche est de 3 jours.
Historique et évolution
Ce mouvement est le bébé de Yoshikazu Akahane, un ingénieur de Seiko Epson qui a eu l’idée de base du Spring Drive en 1978. Après 20 ans de développement, Seiko présente le Spring Drive à Baselworld 1998, avant de commercialiser les premières montres au Japon en 1999. Malheureusement Akahane meurt en Août 98 sans voir vu la commercialisation de ces montres.
Les premiers Spring Drive à ne pas être des éditions limitées sont commercialisés au Japon en 2002 et il faudra 6 ans entre l’annonce des premiers Spring Drive en 98 et la sortie ce qui était le rêve d’Akahane: un mouvement Spring Drive à remontage automatique avec 3 jours de réserve de marche. Le Spring Drive aura donc été en développement durant 28 ans, avec plus de 230 brevets et de 600 prototypes pour pouvoir finalement réaliser la vision qu’avait eu son créateur à la fin des années 70.
Le Spring Drive fera son apparition chez Grand Seiko en 2004 avec le 9R65, un mouvement 3 aiguilles + date, puis avec le 9R66 qui offre en plus la fonction GMT en 2006. Viendront ensuite deux mouvements chronographes en 2007, le 9R84 avec date et indicateur de réserve de marche et le 9R86 avec en plus la fonction GMT.
Grand Seiko propose également des mouvements spécialement ajustés, avec des cristaux de quartz spécialement sélectionnés. On retrouve le 9R15 date, le 9R16 GMT et le 9R96 chronographe+GMT+indicateur de réserve de marche+date. Ils sont reconnaissables par le médaillon du lion en or présent sur le rotor, comme les Special ou VFA 9S. Ces mouvements proposent une précision de +/- 10s/mois
On peut noter que la découpe des ponts représente la chaîne de montagne Hotaka qui entoure Seiko Epson où sont fabriqués ces mouvements.
Grand Seiko propose également des Spring Drive encore plus exclusifs, entièrement faits et décorés à la main par le Micro Artist Studio, une unité d’élite d’une dizaine d’artisans et artistes qui fabrique les pièces les plus exclusives de Seiko. Les personnes chargées de la décoration des mouvements ont été formées par Philippe Dufour en personne.
On retrouve le 9R01 sorti en 2016, un mouvement manuel à 8 jours de réserve de marche donc la décoration (ponts, découpes, vis et rubis) représente une carte du Japon, avec le Mont Fuji, le Lac Suwa et les lumières de la ville du même nom et le logo du MAS qui représente la situation géographique du studio.
En 2019, le Micro Artist Studio sort un deuxième mouvement GS avec le 9R02, dérivé du 7R14 que l’on retrouve dans la Credor Eichi. C’est un mouvement rempli à la fois d’innovations technologiques et de sublimes décorations manuelles. La découpe du barillet représente la campanule, la fleur de la ville où sont faites ces montres. La découpe des ponts représente la tige et l’angle rentrant représente une feuille. Techniquement, le barillet unique abrite deux ressorts montés en parallèle et le mouvement utilise un système appelé Torque Return System qui «recycle» l’énergie mécanique non utilisée par le système Tri-Synchro pour remonter la montre. L’ensemble permet de passer à 84h de réserve de marche, contre 72 en temps normal.
Les deux mouvements GS du MAS ont leur indicateur de réserve de marche au dos de la montre.
Les artisans du Micro Artist Studio ont également collaboré avec les horlogers de Grand Seiko pour partager leurs connaissances et leur savoir-faire. Le résultat est le mouvement 9R31 sorti en 2019, en quelque sorte une version simplifiée du 9R02, avec moins décorations manuelles et sans le Torque Return System. Il s’agit d’un mouvement manuel sorti pour les 20 ans du Spring Drive. Comme les mouvements du MAS, l’indicateur de réserve de marche est également au dos.
Nouveauté
En 2020, pour son 60ème anniversaire, Grand Seiko sort un tout nouveau mouvement Spring Drive, évolution du 9R6, le 9RA5.
Il propose trois grandes améliorations: une réserve de marche augmentée de plus de 60%, qui passe à 5 jours, une amélioration de la précision qui passe de +/-15 à 10 s/mois, et une épaisseur de mouvement qui passe de 5,8mm à 5,0mm.
Ceci est rendu possible grâce à diverse innovations.
Le système de remontage automatique spécifique à Seiko, le Magic Lever, subit sa plus grande évolution depuis sa sortie en 1958: les ingénieurs ont réussi à excentrer ce système pour gagner en épaisseur, mais tout en maintenant l’efficacité de ce système génial. La tige de remontoir et la couronne ont aussi été ramenés plus bas pour les rapprocher du poignet du porteur. Le but est d’abaisser le centre de gravité du mouvement et de la montre, un effort important mené par Seiko dernièrement.
Souvent, la finesse est synonyme de fragilité, mais en replaçant le train de rouage au centre du mouvement et en créant un pont unique très rigide, le mouvement est encore plus résistant que le 9R6.
La réserve de marche est améliorée grâce à l’utilisation de deux barillets de taille différentes.
La précision est améliorée grâce à un nouveau circuit amélioré, un quartz vieilli et sélectionné, et avec un oscillateur et un capteur encapsulés et thermocompensés, à l’image du 9F.
La décoration du mouvement s’inspire du givre qui recouvre les arbres autour du studio en hiver, puisque ces montres sont fabriquées dans les Alpes Japonaises.
Liste des références et mouvements associés
9R65 Date - SBGA
9R15 Date (précision accrue) - SBGA
9R66 Date + GMT - SBGE
9R16 Date + GMT - SBGE
9R84 Chronographe + date + indicateur de réserve de marche - SBGB
9R86 Chronographe + date + GMT + indicateur de réserve de marche - SBGC
9R96 Chronographe + date + GMT + indicateur de réserve de marche - SBGC
9R01 Micro Artist Studio 8 jours de réserve de marche - SBGD
9R31 Manuel - SBGY
9R02 Micro Artist Studio 82h de réserve de marche - SBGZ
Conclusion
La précision et la fiabilité étant les deux valeurs essentielles de Grand Seiko, il me semble essentiel de comprendre ce que propose la marque à ce niveau-là, surtout que chacune de ces trois technologies présente des spécificités uniques qui font vraiment la signature de GS.
L’innovation étant aussi une valeur important pour la marque, il est intéressant de constater qu’ils arrivent à jongler aisément entre un savoir-faire fruit d’une riche histoire et innovations en tous genre.
Au-delà de l’aspect technique des mouvements, le mélange entre modernité et tradition est une des spécificités de la culture Nippone.
Je suis persuadé que pour bien comprendre Grand Seiko et son approche unique de l’horlogerie, il est important que comprendre comment la culture Japonaise influence l’ADN même de cette marque.
Ce sera le sujet du prochain chapitre de “Grand Seiko pour les nuls”.
Grand Seiko pour les Nuls - Le design (Partie 2)
Dans cette deuxième partie de “Grand Seiko pour les Nuls”, nous allons encore parler design, en nous intéressant cette fois-ci aux cadrans, aiguilles et index. Et comme vous allez le constater, encore une fois rien n’est laissé au hasard…
Après avoir abordé le design des boitiers dans la première partie, je vous propose maintenant de regarder d’un peu plus près ce qui se passe au niveau du cadran, de ses index et de ses aiguilles. Et quand je dis d’un peu plus près, je veux dire de très très très près !
Alors sortez les loupes et les microscopes puisque là, on ne parle plus seulement d’apprécier un objet qu’on peut apercevoir de loin dans une vitrine, on parle de se mettre à l’échelle d’un petit insecte qui irait se balader sur le cadran d’une GS !
En effet, si la Grammaire du Design est née de la volonté de faire des montres qui attirent l’oeil quand on rentre dans une boutique (et donc qu’on apprécie à quelques mètres ou quelques centimètres), on peut considérer que le design au niveau du cadran correspond à une deuxième étape d’observation rapprochée, voir extrêmement rapprochée, puisque les designers travaillent à l’échelle du 1/100è de millimètre (0,01mm).
La chose essentielle à garder à l’esprit si on veut comprendre le design des cadrans GS, c’est qu’une fois de plus, tout est pensé pour répondre à une des caractéristiques essentielles de GS: la lisibilité.
La première chose qui découle de ça, c’est qu’on peut déjà distinguer deux types de designs: les montres à cadrans foncés et celles à cadrans clairs. Et non, je ne vous prends pas pour des simples d’esprit, cette distinction basique joue en fait un rôle majeur sur un ensemble de détails essentiels ! Et cela concerne la finition des index et des aiguilles.
Les aiguilles
L’immense majorité des aiguilles GS sont des aiguilles dauphines qui présentent une surface supérieur plate et des chanfreins polis. Et c’est là que la couleur du cadran rentre en jeu !
La plupart du temps (et ce depuis 1960, bien que ça se perde un peu maintenant), la plupart du temps l'aiguille des heures est légèrement plus large que l'aiguille des minutes), toujours pour soucis de lisibilité.
Sur les cadrans clairs, les aiguilles sont entièrement polies (y compris leur face inférieur. Oui oui !). Ce poli comparable au poli noir ou poli bloqué qu’on retrouve sur certaines pièces des mouvements de haute horlogerie présente une caractéristique propre (qui vaut son nom au poli noir), c’est que la pièce étant parfaitement plate et polie, elle renvoie la lumière dans une seule direction, ce qui a pour effet de faire apparaître la pièce soit blanche, soit noire, soit d’une teinte de gris intermédiaire. Le chanfrein de l’aiguille permet donc un complément idéal à sa face supérieur puisque si l’aiguille apparaît blanche, les chanfreins apparaîtront noirs ou gris et si l’aiguille apparaît noire, les chanfreins apparaîtrons blancs ou gris. Dans tous les cas, les chanfreins joueront un magnifique contraste avec les aiguilles pour permettre une lisibilité optimale.
Sur les cadrans foncés, les choses sont un peu différentes. En effet, si les aiguilles étaient polies, le fait qu’elle apparaissent noires selon la lumière rendrait la lisibilité assez moyenne (malgré les chanfreins). Les aiguilles des cadrans sombres sont donc toutes brossées dans la longueur avec les chanfreins polis (contraste encore une fois). Ce brossage permet aux aiguilles de rester toujours dans une teinte claire pour mieux se détacher du cadran. Les chanfreins polis apparaissant tantôt noirs tantôt blancs donnent l’impression que les aiguilles sont plus ou moins fines, ce qui rajoute encore aux jeux de lumière et aux variations que prennent les GS selon l’ambiance lumineuse.
Et ici aussi, le soin apporté aux finition est maximal puisque toutes les finitions sont faites à la main.
Parmi les aiguilles polies, une partie partira pour le brossage qui est fait individuellement par un opérateur. Chaque aiguille sera donc brossée une par une grâce à une petite machine sur laquelle l’opérateur pose l’aiguille, brosse puis utilise une vis micrométrique pour abaisser l’abrasif progressivement jusqu’à obtenir le brossé désiré.
L'abrasif est situé sur une la face inférieure d'une sorte de tiroir que l'opérateur fait frotter sur la partie supérieure de l'aiguille. La vis micrométrique que l'on voit en bas permet de descendre progressivement l'abrasif..
C'est rapidement visible à 3:02 ici (coupez le son !)
Pour les aiguilles bleuies (les aiguilles des secondes sauf quelques rares éditions limitées d’il y a longtemps), elles sont également bleuies une à une par un opérateur qui ne peut faire que deux aiguilles en même temps (chacune sur son support). C’est lui qui décide à l’oeil le moment où l’aiguille peut être retirée de son support chauffant.
Le processus est visible à partir de 2:52 ici (je vous conseille vraiment de couper le son !)
Ou ici à partir de 3:06
Ensuite, l’aiguille et son canon sont assemblés également à la main à l’aide d’une machine et d’un petit maillet. Quand je vous dit que la quantité de travail manuel est affolante…
Les index
Comme la grammaire du design l’exige, l’index de 12h est toujours un index double ou plus large, par soucis de lisibilité. C’est la plupart du temps vrai également pour les index de 6h et 9h (et 3h pour les modèles sans date).
Tout comme les aiguilles, les index des cadrans clairs sont entièrement polis et ceux des cadrans foncé présentent une face supérieur striée. L’idée est la même que pour les aiguilles: présenter un contraste qui permet que les index ne se confondent jamais avec le cadran. La plupart des index striés sur le dessus ont un chanfrein poli et des faces latérales brossées, donc trois types de finitions différentes. Le brossé et le strié permettent de «détacher» l’index du cadran et les parties brossées permettent un contraste et des reflets pour plus de lisibilité.
Le striage de certains index donne parfois un effet arc-en-ciel magnifique comme si l’index était un prisme.
Depuis peu, Grand Seiko utilise aussi des index bleuis à l’image des aiguilles.
From a bug’s eye view
Sur son site «Seiko Design», Seiko utilise ce détournement de l’expression anglaise «from a bird’s eye view» (littéralement «vue d’oiseau» dans le sens d’avoir une vue aérienne, une vue globale) et le transforme en «vue d’insecte» pour illustrer le fait que ces montres sont dessinées à une échelle minuscule et pensées pour être regardées à la loupe. L’échelle à laquelle travaillent les designers GS est donc le 1/100e de millimètre (soit 0,01mm).
Vous noterez la maîtrise incroyable de photoshop !
Mais ce niveau de détail n’est pas choisi arbitrairement, il correspond en fait au niveau de détail que l’oeil humain peut distinguer. Designer une montre en pensant à des détails de l’ordre du 1/100e de millimètre permet donc de créer des subtilités détectables à l’oeil humain et donc au service...vous l’avez deviné, de la lisibilité !
On retrouve donc souvent des détails mineurs qui peuvent changer beaucoup de choses. Pour les index, cela se traduit par la facette supérieure qui est souvent légèrement surélevée par rapport au reste de l’index de quelques centièmes de millimètre, le tout avec toujours un parfait polissage évidemment (cf les photos au-dessus).
Ca veut dire également que les index ne sont pas en contact direct avec le cadran mais qu’il y a une légère couche de vernis entre le cadran et l’index, ce qui permet de surélever légèrement l’index par rapport au cadran, ce qui donne l’impression que celui-ci flotte au-dessus du cadran et permet, une fois de plus, une meilleur lisibilité. Vous pouvez apprécier ces différents détails sur la photo avec la coccinelle ou avec le designer (une future légende de GS, Shinichiro Kubo, papa de la Snowflake, de la SBGE001, de la première plongeuse GS etc) passé au cycle intensif du lave-linge.
Les cadrans
Les cadrans GS sont très variés et presque chaque référence a un cadran unique. Mais il y a quelques «classiques».
La spécialité des GS fabriquées à Shojiri (dans les montagnes de la préfecture de Nagano) par Seiko Epson et équipées du mouvement 9R Spring Drive ou du 9F Quartz est le cadran champagne soleillé, un cadran complexe à fabriquer, qui demande un grand nombre d’étapes et dont le rendu est magnifique, d’une texture soyeuse subtile et changeante qui va du beige au gris avec une multitude de reflets différents possibles. C’est la fierté de Shinshu. Un régal !
On voit ici parfaitement le travail réalisé sur ces cadran soleillés
Un petit avant/après
Le processus est visible à partir de 3:33 ici, mais le plus important est de voir que la personne qui s'occupe du soleillage coupe entretient à la main la roue qui fait le soleillage du cadran en coupant à l'aide d'un ciseau traditionnel Japonais les petits fils abimés... Je vous le dis, ils sont fous !
Et le résultat n’est pas trop mal…
Mais le cadran le plus connu est sûrement le cadran Snowflake. Bien qu’on retrouve des cadrans très semblables sur des Seiko ou Grand Seiko vintage, la technique a été revue et adaptée pour arriver à ce rendu. Je reviendrai dans un autre chapitre sur la symbolique qui se cache derrière ce cadran et d’autres, mais ça n’est pas un secret que ce cadran évoque un paysage enneigé, typique de la région de Nagano où ces montres sont fabriquées.
L’autre centre de production des GS (celles équipées du mouvement 9S mécanique) se trouve à Morioka, au nord du Japon dans la préfecture d’Iwate qui tient son nom de la montagne qui domine la préfecture.
Les designers se sont inspirés des contreforts de ce fameux sommet qu’on peut admirer depuis les fenêtres du Shizukuishi Watch Studio (le studio GS au sein de Seiko Instruments Incorporation) pour créer le cadran que l’on surnomme cadran Iwate (logique).
Il s’agit du cadran «signature» des GS mécaniques, une sorte de réponse au cadran Snowflake des GS Quartz et Spring Drive. Cette texture a été déclinée en plusieurs couleurs.
Comme je l’ai déjà dit, il existe presque autant de cadrans que de références GS. Je ne reviendrai donc pas sur tous les cadrans mais j’évoquerai ceux qui ont une symbolique particulière dans le chapitre approprié.
En attendant, voici quelques exemples de couleurs et textures qu'on retrouve chez Grand Seiko
Dans tous les cas, ces cadrans sont extrêmement difficiles à montrer en photo et s'il est bien une chose à admirer à la lumière naturelle, ce sont ces cadrans ! Ils sont très subtils et nuancés, lorsqu'il y a un motif, celui-ci est souvent très discret et le cadran n'est presque jamais le même !
Pour ce qui est de la fabrication de ceux-ci, elle est bien évidemment gardée secrète par GS mais je peux vous dire que pour un simple cadran soleillé champagne comme montré un peu plus haut, il y a plus d'une douzaine d'étapes !
Le guichet de date
Je ne reviendrai pas sur les excellentes finitions de cette partie du cadran mais plus sur le dateur en lui-même. Dans la majorité des cas, les cadrans clairs ont un daté argenté ou blanc avec la date en noir et sur les cadrans noirs, le dateur est noir avec la date argentée (avec cependant quelques exceptions). Mais sur les cadrans de couleur, le dateur est systématiquement argenté.
Bien que l’accord cadran/dateur face partie des obsession compulsives du forumeur moyen, la règle ici n’est pas respectée. Je suppose que c’est pour une question d’équilibre, le dateur prenant souvent la place d’un index (qui est donc de couleur argentée la plupart du temps), le dateur argenté permet de garder un certain équilibre. D’autre part, quand GS fait des cadrans de couleur, cette couleur est généralement très changeante de par le traitement complexe du cadran et il serait difficile d’obtenir le même effet sur le dateur. Mais bon, je pense que c’est surtout une question d’équilibre visuel. Une question qui fait beaucoup débat.
L’indicateur de réserve de marche
Ca ne vous aura sûrement pas échappé, l’immense majorité des Spring Drives sont équipés d’un indicateur de réserve de marche à environ 7h côté cadran alors que ces montres sont toutes automatiques. La seule exception est la GS Spring Drive 8 jours qui a son indicateur coté mouvement (et il s’agit pourtant de la seul GS Spring Drive manuelle).
Cet indicateur divise l’opinion et ça fait souvent partie des choses qui déplaisent à ceux qui découvrent ces modèles. Je dois dire que j’en faisais partie mais que depuis, je m’y suis fait et maintenant ça me ferait bizarre de voir un Spring Drive sans cet indicateur. C’est un peu la signature des GS Spring Drive pour moi.
Et quand on voit le travail de finitions qui est fait sur certains de ces indicateurs...
A noter, il a existé des mouvements GS automatiques 3 jours avec un indicateur de réserve de marche à environ 3h sur le cadran (les SBGLxxx) mais cette gamme a été arrêtée assez vite, il semblerait qu’il y ait eu quelques soucis de fiabilité d’après les rumeurs. Donc à part ces rares exceptions, indicateur de réserve de marche = Spring Drive.
Le nouveau mouvement Spring Drive 9RA5 propre quant à lui l’indicateur de réserve de marche à 10h.
Les logos appliqués
Depuis 2017, Seiko a souhaité rendre Grand Seiko autonome et un des changements le plus visible est celui des cadrans. Les anciens cadrans comportent la mention Seiko à 12h, les nouveaux ont le logo GS et le texte Grand Seiko à 12h. Voici quelques comparatifs entre ancien et nouveau cadran.
Il n’était pas possible d’évoquer le design sans parler de ce changement radical.
Dans tous les cas, ces logos sont appliqués et légèrement surélevés au-dessus du cadran, ce qui ne change évidemment rien à la lisibilité mais est du plus bel effet. Sans parler des moments où le logo se reflète sur la partie inférieure de l’aiguille des minutes puis sur la partie supérieur de l’aiguille des heures (ou tout autre jeu de lumière du genre, c’est assez hallucinant !).
Conclusion
Il y aurait bien d’autres choses à raconter sur les cadrans GS qui sont sans aucun doute parmi les plus beaux et les plus soignés du marché. On pourrait évoquer les liens avec les GS vintage (1960/1975) ou nombres de modèles Seiko anciens. Chacun de ces cadrans est un petit chef d’oeuvre à lui tout seul qui mériterait d’être admiré au microscope ou à la binoculaire pour apprécier tous les détails, les nuances, le nombre de peintures différentes utilisés pour la sérigraphie de chaque cadran, les jeux de contrastes et de nuances ou la symbolique qui s’y cache. On pourrait comparer les index et les aiguilles de différentes références, les cadrans qui semblent identiques mais qui ne le sont pas etc. Mais là, ça ne serait plus «Grand Seiko pour les nuls» mais plutôt «Grand Seiko pour les dipterophiles».
Encore une fois, ces cadrans sont faits pour être appréciés à la lumière naturelle et bien que magnifiques à l’oeil nu, ils sont également faits pour être appréciés à la loupe et je vous invite à vous régaler de la richesse de ces détails comme si vous étiez un petit insecte qui se balade sur le cadran la prochaine fois que vous aurez le plaisir d’avoir une GS entre les mains !
Il y a donc énormément de choses à raconter et/ou montrer quand on regarde d'un peu plus près les cadrans GS, en particulier l'excellent article de GNKT sur Chronomania intitulé "Grand Seiko Limited Edition et cadrans très spéciaux" !
Pour tout le reste, la discussion est ouverte !
Grand Seiko pour les nuls - Le design (partie 1)
Au travers d’une série d’articles qui reprend le fameux nom “… pour les Nuls”, je vous propose de découvrir de manière claire et synthétique les codes de Grand Seiko. Dans cette première partie, il sera question du design propre à la marque et à son évolution de 1960 à ce jour.
Grand Seiko est une marque qui commence à prendre beaucoup d’ampleur auprès des amateurs de montres et on commence à en entendre parler un peu partout. Que ce soit sur les gros blogs comme Hodinkee ou A Blog to Watch qui n’ont cesse d’encenser la marque Japonaise, ou même à la TV et à la radio.
Depuis que GS est devenue une marque séparée de Seiko, un virage assez marqué a été pris en terme de communication et Grand Seiko n’est plus un secret bien gardé entre quelques collectionneurs aguerris mais une marque qui commence à se faire tranquillement connaître et respecter à sa juste valeur.
Seulement, voilà, Grand Seiko est une marque qui a besoin d’être présentée, expliquée, décryptée pour bien comprendre ce qu’elle représente, ses codes, son ADN, ses valeurs, sa philosophie. Nous avons maintenant la chance d’avoir un réseau GS qui grandit de jour en jour pour apprécier les belles en chair et en acier, et une foultitude de photos sur le web. Mais s’arrêter là serait bien dommage quand on peut finalement assez simplement faire comprendre les spécificités de cette belle marque à quiconque souhaite les comprendre.
Le but de cette série d’articles “Grand Seiko pour les nuls” est donc de décrypter de manière abordable, simple et la plus synthétique possible les grandes lignes de ce qui fait Grand Seiko. Je m’adresse donc ici en priorité à ceux qui ne connaissent pas encore cette belle marque.
1960: les débuts de Grand Seiko
Quand Seiko sort sa première Grand Seiko en 1960, le design de cette montre est tout à fait classique, bien exécuté mais pas particulièrement novateur.
En 1963 sortira le deuxième modèle de Grand Seiko, la 57GS. Elle reprendra globalement le design du premier modèle mais dans une version modernisée avec un boitier plus imposant, des cornes plus larges, mais toujours les mêmes chanfreins, et le même design pour les aiguilles et les index.
Ces deux premiers modèles seront une source d’inspiration de certains modèles modernes, j’y reviendrai plus tard.
En 1967 sortira le troisième modèle de Grand Seiko, la fameuse 44GS, un modèle qui aura un impact énorme dans l’identité visuelle de Grand Seiko.
Taro Tanaka et la grammaire du design
Taro Tanaka est le premier diplômé d’une école de design à intégrer Seiko. Avant ça, il n’y avait pas de designer chez Seiko et même pas d’équivalent en Japonais pour expliquer le rôle d’une telle personne. C’est lui qui apportera à Seiko une vision du design de la montre dans sa globalité.
Tanaka mettra au point un ensemble de règles de design qui définiront le style de Seiko, que l’on a nommé par la suite «Grammaire du Design» (mais que les Japonais appellent simplement le style Seiko).
Le but est de créer un ensemble de règles qui définiront l’identité visuelle de la marque et bien que ces règles aient été pensées pour Grand Seiko, elles seront appliquées de manière plus ou moins marquées dans différentes collections Seiko.
Le design des Grand Seiko devait être au service des valeurs fondamentales de GS: la lisibilité, la précision et la durabilité. Ainsi, le design des GS est toujours pensé pour aller dans le sens de la lisibilité et dans ce domaine, rien n’est laissé au hasard.
Il existe plusieurs «version» de ces règles, mais on pourrait les résumer en quelques points qui sont:
- l’utilisation de surfaces planes et parfaitement polies pour le boitier. Aucune partie du boitier ne doit être arrondie
- les aiguilles et les index doivent être facetés pour renvoyer au mieux la lumière pour une bonne lisibilité dans toutes les conditions de luminosité.
- la lunette doit être polie et présenter deux facettes, une plate et une en biseau
On pourrait considérer d’autres détails mais voici au moins les grandes lignes. Si vous voulez aller plus loin, il existe beaucoup de sources intéressantes sur ce sujet.
Mais ce qui est intéressant, c’est plutôt de comprendre la philosophie de ce design, son inspiration, sa raison d’être. Le design de GS est un design qui se veut sobre et qui s’inspire de code très Japonais.
Pour comprendre ça, il faut comprendre ce qui a poussé Taro Tanaka a mettre au point cette Grammaire du Design.
Un beau jour de 1962, Tanaka se rend à Wako, un grand magasin de luxe appartenant au groupe Seiko et qui vend de grandes marques Suisses aux côtés de sa propre production. En rentrant, Tanaka a tout de suite été attiré vers une vitrine qui lui avait tapé dans l’oeil à cause de la brillance et de l’éclat des montres qui s’y trouvaient. C’est en arrivant presque machinalement devant la vitrine qu’il se rendit compte que les montres qui l’avaient hypnotisé jusqu’ici n’était pas des GS mais des montres Suisses. Et dans la vitrine d’à côté, les Grand Seiko semblaient bien ternes par rapport à la production Européenne. C’est là qu’il décida qu’il devait donner un éclat à ses montres pour qu’elles attirent tout de suite l’oeil des clients qui passent par là.
Comme cela a déjà été expliqué dans l’article consacré à Taro Tanaka, il ne s’agissait pas d’une flânerie impromptue mais bien d’une volonté forte de Seiko de “rattraper et dépasser la Suisse”, cette expression étant le mot d’ordre donné par Shoji Hattori, le président du groupe et fils de Kintaro Hattori.
C’est donc la deuxième caractéristique du design des GS, en plus d’être lisibles elles doivent proposer une brillance, un éclat caractéristique qui les distinguent de toutes les autres.
L’idée centrale derrière la Grammaire du Design, c’est celle des contrastes, des clairs obscurs, des dégradés et de la façon dont la montre va jouer avec la lumière et l’ombre.
Je vous invite déjà à remonter de quelques lignes et re-regarder la photo de la 44GS et d'apprécier les contrastes et les jeux de lumière qu'offre déjà cette simple photo de la montre...
C'est bon, vous avez bien regardé? Bon, on peut continuer
L’inspiration derrière la grammaire du design
Fier des racines Nippones de la marque et de son héritage culturel, Taro Tanaka s’inspira fortement de cette culture pour mettre au point la grammaire du design. En effet, les notions d’ombre et de lumière font partie intégrante de l’esthétique Japonaise et c’est avec cette philosophie qu’il a développé le Seiko Style.
On peut noter deux influences majeures dans ces influences.
La première, ce sont les portes shoji, ces panneaux coulissants recouverts de papier washi, le papier traditionnel Japonais.
Il s’agit d’un point essentiel de l’architecture traditionnelle Japonaise depuis des siècles et la particularité de ses portes est de créer un lien lumineux entre l’intérieur et l’extérieur au travers de nombreux jeux de lumière au cours de la journée, le tout en s’appuyant uniquement sur des lignes droites et des surfaces planes. Il s’agit d’une expression singulière d’une sensibilité esthétique très Japonaise qu’on retrouve ailleurs, comme dans les ombrelles traditionnelles. Des formes épurées et simples qui permettent des jeux de lumière complexes et changeants.
Une autre inspiration de Taro Tanaka fut la taille des diamants. En effet, les diamants répondent à des critères et des codes de taille très spécifiques qui ont pour but de donner une brillance maximale à la pierre.
De la même manière, Taro Tanaka va tailler ses boitiers comme des diamants, s’assurant que ceux-ci ont une brillance optimale et un éclat unique, comme un beau diamant.
Les designs des boitiers de GS sont donc étudiés avec des cotes très précise, des angles et surfaces plates pensées pour tirer le maximum du boitier et lui donner cet aspect qui n’est pas sans rappeler le diamant, que ce soit par sa forme ou sa brillance. Ceci n’aurait jamais pu être possible sans le nouveau standard de design mis au point par Taro Tanaka. Si vous ne savez pas de quoi je veux parler, rendez-vous sur l’article qui reprend les grands axes de la carrière de Tanaka.
Le fameux polissage zaratsu…
Pour tirer un maximum de brillance et d’éclat du boitier, il faut donc des surfaces parfaitement planes et des angles vifs. Un diamant arrondi perd tout son éclat et sa valeur...
Pour cela, il fallu utiliser une technique de polissage parfaite qui donne des surfaces au poli miroir immaculé et sans aucune distorsion, tout en respectant les angles vifs qui structurent le boitier.
C’est ainsi qu’est née la technique dite «zaratsu», nom qui vient des machines Sallaz, des polisseuses (lapidaire) Allemandes importées au Japon puis modifiées avec une technique adaptée pour obtenir un poli miroir parfait.
Pour faire simple, le polissage zaratsu correspond au poli bloqué ou poli noir qu’on retrouve sur certaines pièces des mouvements en «Haute Horlogerie»: cette fois-ci, au lieu d’appliquer la pièce sur une plaque de zinc avec un agent polisseur, c’est la plaque de zinc qui tourne et le boitier y est appliqué à la main. C’est une technique très très longue qui demande une maîtrise parfaite des gestes acquise après des années d’entraînement.
Là où on retrouve ce type de polissage sur des têtes de vis ou des coq de balancier sur des pièces d’exception, GS l’applique sur les aiguilles, les index, les bracelets et l’intégralité des boitiers. Le brossage ne se fait qu’après, à la main, sur les zones dédiées. Le poli miroir parfait de ces parties permettent de donner un vrai éclat aux parties brossées.
Il y aurait encore beaucoup beaucoup de choses à raconter sur le polissage zaratsu mais pour l’instant, je m’en tiendrai à ça.
L’utilisation du zaratsu n’est finalement qu’une conséquence de la philosophie du design GS.
Je m'arrête là pour le zaratsu, cette seule technique mériterait un long article à elle seule !
La fameuse 44GS
Donc en 1967 sort la 44GS, première incarnation totale de la Grammaire du Design, un jalon dans l’histoire de Seiko puisqu’elle marque un changement radical dans l’identité visuelle de Seiko et Grand Seiko.
Les modèles de Grand Seiko qui sortiront par la suite s’inspireront beaucoup (ou pas) de ce design très novateur et toujours aussi appréciable 50 ans après.
La 61GS «Arabesque» est un autre parfait exemple de la Grammaire du Design, avec son saphir taillé qui n’est pas sans rappeler un diamant.
Grand Seiko, la belle au bois dormant
Avec la déferlante du quartz sur le marché, Seiko décide finalement d’arrêter la gamme Grand Seiko en 1975 (j’en parlerait dans un prochain article).
La marque sortira de son sommeil en 1988 avec la sortie de montres haut de gamme quartz. Après une décennie de «HEQ» (High End Quartz) pour le marché Japonais, Grand Seiko revient sur la scène des montres mécaniques en 1998 avec la SBGR001 et la SBGR002.
Ces deux modèles poseront les bases de ce que seront les GS modernes: des montres simples et sobres dont le design s’inspire plus ou moins directement des modèles anciens des années 60/70 (sans parler des rééditions vintage évidemment).
En effet, la SBGR002 reprend de manière très directe le design de la première GS de 1960 avec son boitier doré et ses cornes rapportées avec ce chanfrein si distinctif.
La SBGR001 sera elle une version plus modernisée de ce design, qui reprend ce fameux chanfrein mais dans une design plus fluide et actuel. On voit donc que l’idée de s’inspirer du vintage pour faire à la fois une réédition fidèle et une réédition modernisée ne date pas d’hier chez Seiko.
Ce design continuera d’évoluer, avec d’une part des boitiers qui reprennent le style de la première GS et de ses cornes rapportées, et d’autre part avec des boitiers plus fluides et élancés.
Puis sortira en 2014 des modèles hommage à la fameuse 44GS qui reprennent son design soit de manière très fidèle, soit de manière plus modernisée.
Les exemples de “44GS modernisée” ne manquent pas. N’hésitez pas à faire défiler la galerie pour voir les différentes images.
Il y a un autre modèle moderne qui s’inspire clairement d’un design vintage. Il s’agit de la SBGD001/201/202/205 dont le boitier n’est pas sans rappeler celui de la 57GSS
L’épaisseur des Grand Seiko
C’est un point qui revient souvent et qu’il me semble intéressant de traiter ici.
En effet, on reproche souvent aux Grand Seiko d’être des montres trop épaisses lorsque l’on regarde leurs dimensions sur le papier.
Mais cette épaisseur a une raison. En effet, lorsque j’ai cité les valeurs fondamentales de Grand Seiko, vous n’avez pas manqué de remarquer qu’en plus de la lisibilité, les GS se focalisent sur la précision et la fiabilité. C’est pour cette raison que les calibres mécaniques de Grand Seiko sont relativement épais, par soucis de fiabilité et de précision. Les mouvements Spring Drive sont légèrement plus fins et les quartz le sont encore plus.
En effet, comme l’accent est mis sur la robustesse et la précision, les concepteurs de ces montres préfèrent avoir un mouvement plus épais mais qui assure ces deux conditions.
Le design vient dans un deuxième temps gommer l’épaisseur de la montre au poignet de manière très intelligente et ces montres se portent finalement très bien, en épousant parfaitement le poignet. En effet, d'une part la carrure de la montre vient cacher toute la partie du fond de boite qui disparait au poignet et d'autre part, le galbe général de la montre et la cornes plongeantes permettent de venir épouser le poignet parfaitement.
Ceci étant dit, Grand Seiko a travaillé à réduire l’épaisseur de ses montres, soit avec les mouvements manuels (les 9S63 et 9R01 par exemple) mais aussi avec les nouveaux mouvements sortis en 2020.
Conclusion
Bon, je vous avais dit que je ferais court, mais ceux qui me connaissent ou les lecteurs habitués du blog savaient à quoi s’attendre !
Je n’ai parlé ici presque uniquement que du design des boitiers GS et surtout de la philosophie de ce design et de ce qu’elle implique pour le polissage et l’épaisseur des boites. J’ai essayé d’être synthétique tout en apportant assez d’informations pour comprendre l’héritage de la marque mais on pourrait continuer à en parler pendant un long moment, que ce soit pour le design des modèles vintage ou celui des montres modernes et de tout ce que cela implique.
J'ai également évoqué rapidement le fameux zaratsu. Mais là aussi, le sujet n'a été qu'effleuré à sa surface mais je vous ferai un article plus approfondi à ce sujet.
Je parlerai plus en détail du design et des finitions coté cadran dans le prochain «Grand Seiko pour les nuls» avant d’attaquer le coté horloger de la chose.
A très vite pour la suite !